L'hydrothérapie intervient la plupart du temps après que tous les autres traitements médicaux aient échoués. Le Docteur Louis Fleury est alors un éminent spécialiste de cette méthode. Il considère que : "l'hydrothérapie n'est pas seulement une affaire de robinets, d'appareils... mais qu'elle est toute entière, dans la main qui dirige la douche, et dans l'intelligence qui dirige la main". En effet, comme son nom l'indique, les patients y venaient pour recevoir des traitements à base d'eau froide envoyée avec plus ou moins de pression sur les parties à traiter. De là, à la comparer à la thalassothérapie, il y a probablement un grand pas à franchir ! (Pour plus d'informations sur la biographie du Dr Fleury, se reporter à la rubrique "Portraits").
Toujours est-il que depuis quelques années, cette méthode prend un grand essor et a que bon nombre de malades y sont adeptes.
En 1867, le docteur Louis Fleury loue au ténor Gustave Roger une partie du château de La Lande pour y installer à grands frais un Institut Hydrothérapique. Le choix du site peut paraitre surprenant car l'eau du Plessis n'est pas reconnue pour ses qualités médicinales et elle n'est disponible que par les canaux et la mare du château alimentée par des sources naturelles. Très probablement, son implantation en ces lieux est le fruit de relations au sein d'un cercle d'amis déjà installés dans les lieux (Famille Mortier de Trévise, Ténor Roger, famille Concha ou Firmin Marbeau entre autres) mais cette hypothèse même si elle semble tout à fait plausible, reste à prouver.
Portrait Dr Fleury (1855) Huile sur toile de J.F. Portaels (Académie Royale de Médecine de Belgique à Bruxelles)
L'activité du Docteur Fleury se développe rapidement. Une clientèle aisée vient de toute la France mais aussi de l'étranger pour se faire soigner. L’Exposition Universelle du Congrès médical de Paris vient asseoir sa réputation, engageant de nombreux praticiens à venir visiter son établissement modèle. Un centre s'ouvre en 1861 à Schwalheim en Allemagne, un autre suivra à Passy en 1867.
Les conditions de vie dans l'établissement qu'il a fondé dans l'ouest parisien, à Meudon, sont draconniennes. Pour avoir toutes les chances de guérir, il faut, tout d'abord, élire domicile dans l'établissement, ensuite, il faudra se lever tôt et se coucher pas trop tard, et enfin se suffire d'une alimentation simple et régulière. Tous les excitants (vin, café ou thé) sont proscrits, la marche et les exercices en plein air sont fortement recommandés. On ne doit pas omettre parallèlement l'importance de la qualité biologique de l'eau de Bellevue servie à table.
Des personnalités importantes comme Napoléon III ont profité des bons soins du Docteur Fleury.
Dans sa séance du 28 décembre 1872, l’Académie royale de médecine de Belgique, en la personne du docteur Victor Vleminckx, informe l’honorable assemblée de la
disparition du docteur Fleury. Il est, de plus, fait mention que le savant et regretté membre correspondant que la Compagnie vient de perdre, a disposé, en faveur de l’Académie, par testament en
date du 31 août dernier, de son portrait à l’huile de grandeur naturelle, peint par J.F. Portaels, à charge pour elle d’en laisser la jouissance à sa veuve, sa vie durant. L’Académie autorise
alors le Bureau, à faire les démarches nécessaires pour l’acceptation du legs dont il s’agit”
Le Docteur Auburtin a suivi de près les travaux menés par le Docteur Fleury sur l'hydrothérapie. Il livre dans un article paru dans la Réforme Médicale (n° du 5 mai 1867) un témoignage très intéressant non seulement sur les installations de l'Institut Hydrothérapique du Plessis-LaLande mais aussi sur les bienfaits des traitements effectués tout en n'oubliant pas de décrire la qualité du site.
"L'établissement créé par M. Fleury à Villiers-sur-Marne (Seine-et-Oise, 40' de Paris), dans l'ancienne
résidence des princes de Conti et du duc de Trévise, est unique en Europe pour la beauté et la salubrité de ses conditions topographiques. Le beau château de Plessis-Lalande, situé sur un plateau élevé de 106 mètres au-dessus du niveau de la mer, domine la vallée de la Marne ; il est largement aéré, bien qu'il soit entouré de bois admirablement disposés pour la promenade à pied, en voiture et à cheval. Du côté du nord et du nord-est, il est abrité par un parc de 80 arpents, enclos de murs, présentant de magnifiques ombrages séculaires et sillonné par des eaux vives.
L'installation hydrothérapique est au niveau de la beauté du site et de la résidence. La salle de douches est un élégant salon, ou plutôt un amphithéâtre scientifique d'un grand caractère, communiquant, d'un côté, avec deux salles destinées aux sudations en étuve sèche et aux bains de vapeur térébenthinée; de l'autre, avec un magnifique cabinet médical, muni d'appareils électriques, de réactifs, de la balance dont M. Fleury a tiré un si grand parti, en ce qui concerne le diagnostic et le pronostic. Deux salles spéciales sont consacrées aux bains de cercles, aux bains de siége à eau courante, aux douches ascendantes rectales, périnéales, vaginales ; aux douches lombaires, etc. Des rochers, couverts de plantes alpestres, forment une superbe grotte où se trouve une vaste piscine alimentée par une cascade et par une lame d'eau, dont la projection puissante soulève de véritables vagues. Une salle pour les bains simples ou médicamenteux, une salle pour la pulvérisation et les douches filiformes, trente cabinets vestimentaires et un salon d'attente complètent ce remarquable ensemble, dans toutes les parties duquel de puissants calorifères entretiennent
constammentune température de 16° à 18° c.
Un vaste promenoir couvert, muni d'un gymnase, permet de provoquer, en toute saison, une réaction prompte et facile. La pulvérisation et la filiformisation sont, comme on le sait, d'invention toute récente.
La pulvérisation est externeou interne. La pulvérisation externe a déjà donné d'excellents résultats dans le traitement des ophthalmies, des maladies du pharynx et du larynx (Chassaignac, Demarquay, Fauvel, etc.) ; la pulvérisation interne ouvre, par la médication bronchique, une voie nouvelle à la thérapeutique, et, dans son rapport à l'Académie, M. Béclard vient d'en signaler toute l'importance.
La filiformisation fournit à l'hydrothérapie, et spécialement aux médications excitante et révulsive, des agents d'une puissance prodigieuse, dont M. le docteur de Laurès a déjà obtenu de très-bons effets dans le traitement des névralgies et de certaines paralysies.
Voici donc des instruments nouveaux, d'une puissance incontestable, que la thérapeutique a déjà mis en oeuvre avec des avantages réels; mais l'expérimentation clinique en est à peine commencée, et il importe de la poursuivre sur une vaste échelle et dans toutes les parties du cadre nosographique. Or, ici, surgissent de sérieuses difficultés. Les appareils, le temps, les soins qu'exige cette thérapeutique en rendent l'expérimentation impossible — ou du moins très-difficile—au domicile des malades et dans les hôpitaux ; il faut une réunion de conditions, de circonstances qui ne se présentent guère que dans une maison de santé, et spécialement dans un établissement hydrothérapique. Mais cette expérimentation exige encore un expérimentateur habile et prudent, un médecin profondément initié à toutes les difficultés de l'art du diagnostic et de la méthode d'observation ; un médecin qui soit, à un égal degré, physiologiste, pathologiste et thérapeutiste.
Nous croyons que l'établissement de Plessis-Lalande est précisément le lieu où se trouvent réunies toutes ces conditions, et nous espérons que M. Fleury ne faillira pas à une tâche dont le public médical attend de lui l'accomplissement."
Docteur E Auburtin - Réforme médicale (N° du 5 mai 1867).
L'invasion des Prussiens, en septembre 1870, marque un coup d'arrêt à cette activité. En effet, ces derniers ont installé leur quartier général pendant plusieurs mois au château de la Lande : peu à peu, ils réquisitonne les locaux de l'institut relèguant le docteur, sa famille et quelques malades de plus en plus loin jusqu'à leur départ forcé vers la Belgique.
Après le départ de l'armée prussienne, force est de constater que tout est saccagé...
(pour plus d'informations, se reporter à la rubrique " 1870 les prussiens à La Lande" dans Mémoire du Temps).
A son retour en 1871, le Docteur Fleury n'aura pas le courage de tout remettre en ordre et de relancer son activité. Il décédera en 1872.
Arsène Ozanne, nouveau propriétaire du château en 1875, tentera en vain d’y poursuivre durant quelques années une activité médicale sous le nom de «Société anonyme hydrothérapique de Plessis-Lalande La Pouponnière » sous la direction du docteur Joseph Scaglia.
Les bâtiments tomberont progressivement à l’abandon et seront petit à petit démolis.